Une décision historique qui changera le visage de la francophonie
12 juin 2020 | Radio Victoria
Après 10 ans de procédure, la Cour Suprême du Canada a rendu une décision historique ce 12 juin en donnant raison aux francophones de la Colombie-Britannique sur la question du sous-financement chronique des écoles francophones.
Le plus haut tribunal du pays ordonne au gouvernement provincial de payer au Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique 6 millions de dollars en dommages et intérêt et 1 million de dollars pour des fonds que le CSF aurait dû recevoir.
Il ordonne aussi la création de nombreuses écoles francophones à travers la province.
Des gains immédiats dans le Grand Victoria
Selon Mark Power, l’avocat du Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique et de la Fédération des parents francophones de la Colombie-Britannique, qui ont initié cette poursuite, il y a des gains immédiats pour les francophones du Grand Victoria.
En effet, le tribunal y ordonne la création de trois nouvelles écoles.
Celle d’une capacité d’au moins 275 élèves à Victoria Est (ou se trouve actuellement l’école Beausoleil), d’une école de 98 élèves à Victoria Nord (Saanich) et d’un établissement scolaire de 299 élèves à Victoria Ouest (Langford).
« C’est le visage de la francophonie Victorienne qui vient de changer », explique Mark Power, qui a plaidé la cause.
« Chacune de ces écoles [sera dotée] avec un centre communautaire, chacune de ces écoles pouvant offrir un jour une éducation en français de la maternelle à la 12e année ».
Maître Power rappelle que cette victoire est arrivée grâce à la décision en 2010 du CSF et de la Fédération des parents francophones de la Colombie-Britannique de se tourner vers les tribunaux.
Un impact pour tout le pays
La décision suscite beaucoup d’intérêt à travers le pays, car un des éléments clés sur lequel le tribunal devait se pencher était l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.
Cet article définit les droits des francophones et anglophones en situation minoritaire à pouvoir instruire leurs enfants dans leur langue.
Or la Cour Suprême a noté l’interprétation «démesurément restrictive » de l’article 23 par les tribunaux de la Colombie-Britannique.
« Cet article a un objet réparateur, qui vise à favoriser l’épanouissement des minorités linguistiques officielles et à modifier le statu-quo », écrivent ainsi les juges de la majorité.
Cette décision crée en effet des nouveaux principes juridiques, principes qui s’appliquent à toutes les communautés acadiennes et francophones au pays rappelle Marc Power.
Et les implications sont énormes au niveau du financement des écoles. Ces gains « se chiffrent en dizaines de millions de dollars, juste pour Victoria », indique Marc Power.
Au travers sa décision, la Cour Suprême ordonne aussi la création d’écoles dans le Grand Vancouver, mais également dans la région de l’Okanagan, la Vallée du Fraser et dans bien d’autres endroits en Colombie-Britannique.
Réflexion sur les écoles du Grand Victoria
Mark Power a annoncé que, dès ce lundi, le CSF démarrera le travail pour planifier l’avenir. Car la décision de la Cour Suprême va vraisemblablement bouleverser l’éducation dans le Grand Victoria.
« Nous parlons d’une Grande région métropolitaine de Victoria avec plusieurs écoles secondaires », dit Maître Power. «Avec peut-être une école secondaire spécialisée dans les sports, une autre dans les arts et la musique, avec plusieurs écoles élémentaires ».
Cette décision est l’occasion de rappeler les racines francophones profondes de la ville : le français était en effet la langue européenne la plus parlée lorsque la province a rejoint le Canada. Le premier hôpital de la ville fonctionnait en français et le premier quotidien de Victoria était publié en français.
« Ré-apprenons notre histoire, vivons notre histoire, et transmettons là via nos écoles aux prochaines générations ».